Un rapide examen des crédits inscrits au titres des dépenses du projet de loi de Finances 2021 confirme combien le discours gouvernemental sur le « plan de relance » est loin de la réalité budgétaire.
Certaines missions ministérielles enregistrent une augmentation, au moins apparente, de leurs crédits.
- Cohésion des territoires :
Crédits de paiement (CP) 2020 15 153,6 millions
CP 2021 15 991,4 millions (+ 837,8 millions)
Aides personnelles (programme 109) : + 438,6 millions (ajustement)
Compensations de recettes fiscales réduites : + 181,1 millions
- Ecologie, développement et mobilité durable
CP 2020 13 246 millions
CP 2021 20 763 millions (+ 7 517 millions)
Re budgétisation CAS Transition énergétique : + 6 309,9 millions
Re budgétisation Services conventionnés de transports de voyageurs : + 312,7 millions
Budgétisation du fonds « catastrophes naturelles » : + 205 millions
- Enseignement scolaire
CP 2020 74 014, 4 millions
CP 2021 75 925 millions (+ 1 910 millions)
Rémunération enseignants premier degré + 586 millions (+ 970 postes)
Rémunération personnels second degré + 454 millions (- 897 postes)
Vie de l’élève + 55 millions (+ 913 postes)
On notera que les effectifs de surveillance dans les établissements du second degré sont inférieurs aux effectifs de la rentrée 2009 – 2010 et que la médecine scolaire a perdu, sur la même période, 20 % de ses médecins.
- Administration générale et territoriale de l’Etat
CP 2020 3 970,3 millions
CP 2021 4 211 millions (+ 241 millions)
La croissance des crédits est due, pour environ 200 millions, à l’organisation des élections 2021.
- Culture
CP 2020 2 961 millions
CP 2021 3 209 millions (+238 millions)
Transferts venus du Ministère de la Recherche : 110 millions (Universcience)
- Engagements financiers de l’Etat
CP 2020 38 503,7 millions
CP 2021 39 246,6 millions (+ 743 millions)
La hausse provient de l’accroissement des appels en garantie de l’Etat portés à 2 504,8 millions d’euros (au lieu de …94 millions)
Un nouveau chapitre réservoir ?
A noter que le budget anticipe une stagnation des taux d’intérêt avec une baisse de 1 738 millions d’euros des crédits de service de la dette.
- Défense
CP 2020 46 076,5 millions
CP 2021 47 695,4 millions (+ 1 619 millions)
La hausse provient essentiellement de la consommation des crédits d’investissement avec une hausse de plus d’un milliard d’euros, dans le cadre de la loi de programmation militaire.
- Justice
CP 2020 9 389 millions
CP 2021 10 058 millions (+ 1 669 millions)
La hausse s’inscrit dans la loi de programmation, en accordant plus de moyens, ceci dit, au champ de l’administration pénitentiaire.
- Relations avec les collectivités territoriales
CP 2020 3 468 millions
CP 2021 3 915 millions (+447 millions)
La hausse 2021, pour 292,7 millions, est imputable à la compensation de la disparition de la taxe d’habitation pour les Régions.
- Sport, jeunesse et vie associative
CP 2020 1 217 millions
CP 2021 1 369 millions (+ 152 millions)
La hausse est essentiellement due (pour 105 millions environ) aux frais d’organisation des JO de Paris 2024.
- Santé
CP 2020 1 128 millions
CP 2021 1 329 millions (+200 millions)
Une bonne part de la hausse (140 millions environ) est simplement due à l’ajustement des crédits de l’aide médicale d’Etat.
- Sécurités
CP 2020 20 484,7 millions
CP 2021 20 700 millions (+ 215 millions)
La hausse est due à la progression des emplois de la police nationale (+ 1 174 postes) et à ceux de la gendarmerie (+ 1 031 postes)
- Fonction Publique
CP 2020 655 millions
CP 2021 714 millions (+ 59 millions)
La hausse provient des crédits de rénovation des cités administratives (+ 109,5 millions) inscrite dans le Grand Plan d’Investissement en 2018.
L’optimisation énergétique et logistique est recherchée aux fins de réduire la consommation des bâtiments et de libérer des surfaces disponibles à la revente.
- Economie
CP 2020 2 357 millions
CP 2021 2 655 millions (+ 298 millions)
Une bonne partie de la hausse (180 millions environ) procède du déploiement du Plan France Très Haut Débit, issu du Plan d’investissements d’avenir (PIA).
A noter que le report sur 2021 des crédits non consommés sur 2020 facilite la hausse…
- Aide Publique au Développement
CP 2020 3 268 millions
CP 2021 4 904 millions (+ 1 636 millions, soit + 50 % à peu de chose près)
Une bonne partie (853 millions) découle d’un changement de nomenclature budgétaire avec le droit européen (passage d’un compte spécial à un chapitre budgétaire)
Le reste correspond grosso modo aux conséquences de nos engagements internationaux.
Notons que le rendement de la taxe sur les transactions financières s’annonce exceptionnel cette année (déjà supérieur au milliard d’euros fin août.
- Les crédits d’Action extérieure de l’État (+ 66 millions) et de l’Agriculture (+ 31 millions) procèdent d’une augmentation « au fil de l’eau ».
- Il en est de même des missions « Conseil et contrôle de l’Etat » (+ 14 millions environ), « Direction de l’Action du Gouvernement (environ + 70 millions dont 48 pour la présidence française du Conseil de l’Union Européenne), « Travail et emploi » (+ 396 millions dans un contexte de fort accroissement du chômage), « Média, livre et industries culturelles » (+20 millions), « Outre Mer » (+ 60 millions, avec une inflexion à la hausse des crédits d’allégement de cotisations sociales).
Les missions en baisse ou stagnantes
- Pouvoirs publics : stable à 995 millions
- Anciens Combattants : – 70 millions.
- Recherche et enseignement supérieur : – 176 millions
- Régimes sociaux et de retraite : – 74 millions, dus à la réduction des retraités et ayants droit de la marine marchande ou des Mines.
- Gestion des finances publiques : – 132 millions, du fait de la nouvelle saignée d’emplois dans nos administrations fiscales et financières (- 2 135 postes)
- Remboursements et dégrèvements :
CP 2020 140 830 millions
CP 2021 126 122 millions (- 14 708 millions)
La chute libre de ces crédits évaluatifs illustre l’effet de la crise des finances publique issue des mesures de confinement liée à la pandémie Covid 19.
A noter, ceci dit, que l’essentiel de la mission (119 231 millions d’euros) couvre les mesures relatives aux impôts perçus par l’Etat suite au changement de nature de l’allégement de la taxe d’habitation.
Solde provisoire
- Somme des hausses observées : 18 439 millions d’euros
- Somme des baisses observées : 15 160 millions d’euros.
- Solde + 2 739 millions d’euros
- Reclassements, re budgétisations : 8 264,4 millions d’euros
- Solde apparent : – 5 525,4 millions d’euros.
A ce stade, interviennent les crédits ouverts dans le cadre de la mission « Plan de Relance » (21 991 millions d’euros en crédits de paiement) et « Investissements d’avenir » (3 976,5 millions d’euros), ces derniers en hausse de 1 919 millions d’euros sur 2020.
On rappellera ici deux choses
Un, les crédits du Plan d’investissements d’avenir sont gagés sur le fameux « grand emprunt Sarkozy » et constitutifs de sommes débloquées au sein des Programmes, majorées par les avances remboursables.
De manière générale, les crédits PIA sont mixtes avec 50 % de fonds issus de la réserve et 50 % de crédits budgétaires.
Deux, la moitié des crédits de paiement du Plan de Relance procède du programme « Cohésion ». Ces sommes sont affectées à des aides aux entreprises, notamment pour l’embauche de jeunes, d’apprentis ou le maintien de l’emploi à temps partiel.
Sur l’ensemble des crédits de paiement ouverts pour 2021, 10 333, 5 millions vont aux entreprises ; 2 312,3 millions en fonctionnement et 1 240,3 millions pour l’Etat ; 2 371 millions aux collectivités locales ; 1 692 millions aux ménages (moins que l’ancien crédit d’impôt transition énergétique) qui se situait à 1 948 millions en 2018, et encore 1 100 millions en 2020, 235 millions en fonds propres et 2 807 millions aux autres collectivités (FNE, Pôle Emploi, France Compétences, etc…) pour accompagner, en général, le traitement social du chômage.
On peut aussi rapprocher les crédits de paiement de la mission « Relance » (environ 22 Mds d’euros) des sommes mobilisées dans le cadre du « Plan d’urgence lié à la crise sanitaire » qui aura motivé près de 52,4 Mds d’euros de dépenses.
Et rappeler le fait que les crédits concernés ne sont pas inscrits dans la norme de dépenses…