La logique économique du programme du Nouveau Front Populaire (NFP) est de partir des besoins pour engager un nouveau type de développement et d’efficacité :
Temps 1 – « Rupture » et « bifurcation »
- Réponse immédiate aux exigences sociales et écologiques populaires (services, publics, emploi, salaires, minima sociaux, logement, …)
- En mettant des avances financières immédiates à leur service des exigences sociales par la mobilisation du pôle bancaire public et en réorientant les aides publiques
Avec des pouvoirs démocratiques pour contrecarrer ceux qu’exercent les marchés financiers sur les banques et les entreprises (« l’utilisation de l’argent »).
- Pour cela on réalise, en parallèle, des réformes de structure (bifurcation) qui permettent de s’assurer que l’on prend bien le chemin d’un développement pérenne, efficace
- Nouvelle conditionnalité sociale et écologique de toutes les aides publiques
- Pôle public bancaire et financier, réglementation bancaire
- Nouveaux droits d’intervention des travailleurs
- Nouvelle fiscalité
- Augmentation et Modulation des cotisations sociales
- Soumission de « la finance » à cotisation (dividendes, rachats d’action, …)
- Quid d’institutions de planification écologique et sociale ? ?
- Rôle positif des services publics (formation, recherche, écologie, …) et de la
En effet, les enseignements de Keynes et de bien d’autres nous disent que des avances monétaires peuvent permettre de prendre efficacement le chemin d’un autre développement, mais ce n’est pas fatal. Marx, entre autres, montre à quel point le monopole du capital qui vise le taux de profit vient piloter de façon perverse ces avances. Il faut s’assurer que le bon chemin est pris en dirigeant ce flux monétaire selon des critères d’efficacité écologique, sociale et économique.
Alors cet autre développement génèrera les ressources qui permettent d’entretenir de façon pérenne le développement que nous souhaitons
Temps 2 – la « transformation » et le financement auto-entretenu
- La transformation prend alors corps et le financement tend à s’auto-entretenir[1]. Le poids de l’endettement dans le PIB recule, une nouvelle production se développe, les « déficits » économiques et écologiques commencent à se résorber.
Pour cela il faut bien distinguer les temporalités : (1) et (2) réponse aux besoins = « rupture » engagement des réformes de structure = « bifurcation » (3) développement efficace, pérenne = « transformation ».
La logique de développement, c’est que l’écologie et le social (l’emploi, la formation, les services publics et la réduction du temps de travail) sont but et moyen de la transformation, pour une tout autre production et activité économique.
- Développement écologique : diminution des rejets de CO2, économie de matières et de capital matériel, diminution des rejets polluants. Il faut s’en assurer dans tous les projets de ‘investissement et de production et basculer vers une économie où, tout en répondant aux besoins matériels (logement, alimentation, transport, …), la priorité devient le développement des services humains (santé, culture, …)
- Développement social : un emploi de qualité, avec un temps de travail fortement réduit aussi bien à la semaine/année, que tout au long de la vie (retraite plus tôt, temps de formation accru tout au long de la vie), pour permettre aussi bien l’émancipation, l’épanouissement, desserrer la tension du travail que pour permettre la participation à la vie sociale. Le développement des services publics et de la protection social sont décisifs en ce sens. C’est en lien avec la conception d’une sécurisation plus ou moins radicale de l’emploi et de la formation, devenue commune à l’ensemble du monde syndical.
Viabilité et efficacité économique. La question est lancinante depuis 1983-84, mais aussi quand on pense à 1936. On nous attend à ce tournant !
- La première question lancinante est celle des coûts des entreprises : il y a d’une part la nécessité de préserver leurs capacités de développement et d’autre part la compétitivité internationale. Nous proposons certes coopération et des protections Européennes, mais cela est loin de suffire, surtout à court terme… Ce que nous proposons de nouveau, à l’unisson du mouvement social et syndical, c’est la baisse du coût du capital (dont ses prélèvements), et même tous les autres coûts que les dépenses sociales et pour le vivant. Donc une baisse des coûts… mais tout autre !
- La seconde question est celle de l’international et de l’Europe. Pour l’Europe, Le « pacte européen pour le climat et l’urgence sociale » ouvre une bataille pour sortir en commun de l’austérité, par exemple avec un Fonds européen de développement des services publics dans tous les pays de l’UE. Cela éviterait d’être dans une opposition de phase conjoncturelle ! Nous proposons aussi des mécanismes de financement public sur des critères précis, dans l’UE, pour une nouvelle production industrielle et de services.
- Ceci dit, l’international est la partie faible du programme. Peut-on aussi « interpréter » ? Par exemple, il est écrit : « mettre fin aux traités de libre échange » : que met-on à la place ? Des traités de coopération avec le Sud global : échanges et investissement privilégiés si cela développe les biens communs (santé, environnement, …) et l’emploi des 2 côtés, articulé avec des protections économiques.
- Enfin, la question de la monnaie, d’un nouvel ordre économique international et du dollar est ouverte.
Sur le fond, nous pouvons dire que le NFP cherche à tenir compte de l’expérience du Front populaire de 1936 : il agit sur la monnaie et les banques (le Front populaire n’avait pas cherché à impulser un autre crédit aux entreprises, au contraire de ce qui a été fait à la Libération), et à tenir compte de l’échec de 1983-84 (il cherche à agir sur l’offre des entreprises, leurs coûts, pas seulement sur la demande, et sur l’international). S’il se centre bien sur l’orientation d’avances financières massives avec de nouveaux droits pour la société civile et les travailleurs.ses, il tiendra compte de l’expérience réussie de la Libération.
[1] « Tend », car on a toujours besoin d’avances et de crédit, donc les avances et le crédit ne disparaissent pas mais le poids de l’endettement dans le PIB commence à reculer et le PIB a une tout autre composition
Un grand merci pour ces documents très clairs qui aident notre vie militante