Un chiffre expliqué
2,6 %, l’inflation en octobre 2021

L’inflation reprend (elle a bondi de 1,2 % en juillet à 2,6 % en octobre, en glissement annuel), elle est tirée vers le haut par les prix de l’énergie (+20,1 %).

Ce ne serait pas si grave si du côté des effets le pouvoir d’achat n’était pas affecté, sur la base en outre d’une montée considérable de la pauvreté durant la crise sanitaire-économique. Ce ne serait pas si grave si du côté des causes cela correspondait à une « poussée de chaleur » saine, comme quand un sportif accélère, et/ou si elle était temporaire parce que due à des dépenses, des avances, qui préparent vraiment l’avenir (avances pour les services publics, pré-recrutements, emploi, formation, investissement efficace, etc.).

Mais là, on est plus proche de la fièvre. Et sous cette fièvre, on a plus que jamais deux phénomènes : déflation salariale, sociale et des dépenses pour les services publics ; et inflation financière (Bourse, immobilier) et des dépenses publiques pour les profits ou le capital. C’est une fièvre due à la politique du capital et à son avidité.

C’est une inflation du capital et des profits !

La production est marquée de pénuries de main d’œuvre, de goulots d’étranglement, on ne prépare pas sérieusement l’avenir car on dépense pour gonfler le capital et les profits. Il faut dépenser pour développer les femmes et les hommes, leur vie et l’écologie l’exigent.

Comment mesure-t-on l’inflation ?

Ce qu’on appelle couramment l’inflation est la variation moyenne des prix des produits consommés par les ménages. L’indice est basé sur l’observation d’un panier de biens et services, actualisé chaque année. La part de chaque produit dans le panier est proportionnelle à son poids dans la dépense de consommation des ménages. Cette répartition est mise à jour chaque année.

L’information sur les prix a plusieurs sources : les relevés effectués par les enquêteurs de l’INSEE sur 30 000 points de vente, certains prix affichés sur Internet, des sources administratives et les données de caisse des supermarchés.

Comme toute information statistique, l’indice des prix n’est qu’une mesure, une façon de saisir la réalité qui repose sur des choix méthodologiques. On doit donc l’utiliser en étant conscient de ses limites. Par exemple,

  • le poids de chaque produit dans l’indice des prix ne correspond pas nécessairement à celui qu’il a dans la consommation de tel ménage particulier ou de telle catégorie de ménages ;
  • mois après mois, ce sont les mêmes produits dont les prix sont relevés afin de s’assurer que les évolutions de prix ne mesurent pas des différences de qualité du produit qui justifieraient la différence de prix. Cependant, certains produits disparaissent en cours d’année (par exemple : une nouvelle génération de téléphone remplace la précédente) ; alors l’Insee remplace ces produits et effectue des ajustements pour neutraliser la différence de qualité. Ces ajustements reposent sur l’idée qu’à un moment du temps, si deux produits coexistent, leurs différences de prix reflètent une différence de qualité. Mais il s’agit d’une convention, et la façon dont cet « effet qualité » est mesuré peut toujours être discutée, on peut parfois considérer que le service rendu est différent, mais aussi que les ménages sont « contraints » en quelque sorte de se tourner vers ces nouveaux produits ;
  • le poids croissant des « dépenses pré-engagées » des ménages (loyers, remboursements d’emprunts bancaires, abonnements à l’électricité, à l’Internet…) peut créer un écart entre l’inflation mesurée par l’indice des prix et l’impression que peuvent ressentir les consommateurs en constatant les évolutions des prix des biens qui font l’objet de décisions d’achat au jour le jour.

Ces choix méthodologiques correspondent à l’usage de l’indice des prix comme moyen d’analyse des évolutions globales de l’économie. On commente ainsi chaque mois la variation des prix par rapport au mois précédent, et leur variation par rapport au mois correspondant de l’année précédente (son « glissement annuel), qui donne l’indication la plus significative sur l’inflation en tant que phénomène économique.

Quelles sont les causes de l’accélération récente de la hausse des prix à la consommation ?

C’est une inflation du capital pour cinq raisons

  1. La spéculation sur les matières premières : alimentation, gaz et pétrole, tout particulièrement, mais aussi les matières premières industrielles (+29,8 % pour l’ensemble des matières premières importées, en septembre 2021 contre +2,0 % un an avant, en euros).
  2. Les dogmes ultra-libéraux ont fait de l’énergie un pseudo-marché : le prix y est fixé non pas selon les coûts de l’énergie produite mais selon les coûts de la plus chère (« coût marginal »), surprofit inclus. Cela revient à s’aligner sur le prix du gaz (soumis à spéculation) et à subventionner l’utilisation du charbon. Un comble pour la France où grâce au service public de l’électricité et au nucléaire l’électricité est une des moins coûteuses d’Europe !
  3. L’organisation des chaînes mondiales de production par le capital sur la base du coût du travail le plus bas fait qu’elles sont totalement désorganisées à présent parce qu’on n’a pas les moyens de produire de façon répartie les biens intermédiaires (semi-conducteurs, par exemple) et à cause des pénuries de main d’œuvre dans les pays : l’inflation des « prix de production » (les prix pratiqués entre entreprises sur leurs consommations intermédiaires) atteint des sommets (+9,5 % en août 21 contre -2,2 % un an avant, cf. graphique).
  • Le capital impose sa loi du profit : quand l’activité repart, il prélève sa dîme. La plus élevée possible. Par exemple des dividendes. Cela gonfle les prix. Et comme en plus les bourses atteignent de nouveaux sommets, le capital à rentabiliser est gonflé d’autant. Il lui faut donc prélever « toujours plus » sur la même valeur ajoutée (richesses créée) simplement pour maintenir son taux de profit. Il serre les salaires en même temps qu’il gonfle les prix pour ses profits. On marche sur la tête. La part des profits des entreprises dans la VA atteint d’après l’Insee un record historique inégalé en 70 ans de comptabilité nationale !
  • Enfin, comme les banques centrales (Réserve fédérale des États-Unis, Banque centrale européenne, Banque d’Angleterre) ont déversé d’énormes liquidités, mais sans conditions précises, elles ont été captées par les marchés qui s’en sont nourris sans pour autant créer suffisamment de richesses réelles en contrepartie. Ce qui booste l’inflation. Il faut rompre avec cette politique monétaire sans critères d’emploi et de création de « bonnes » richesses.

Les propositions du PCF

Immédiatement :

  • il faut une contribution fiscale exceptionnelle des surprofits des entreprises du secteur de l’énergie, et un blocage des prix et tarifs à leur niveau d’avant la hausse ;
  • il faut que l’État rétrocède le plus perçu de fiscalité sur l’énergie et bloque sa recette énergétique ;
  • Il faut abaisser le taux de TVA sur l’énergie à 5,5%
  • le versement des dividendes par les entreprises du secteur de l’énergie doit être très fortement taxé, voire interdit pour 2021 et 2022.

A moyen terme

Le meilleur moyen de maîtriser les tensions inflationnistes est d’utiliser l’argent déversé par les banques dans l’économie pour sécuriser l’emploi, pour permettre aux salariés de se former, et pour créer ainsi efficacement des richesses au lieu de tout subordonner au rétablissement des taux de profit.

  • Il faut nationaliser les entreprises des secteurs de l’énergie, des télécoms, ou se les réapproprier pleinement pour celles qui sont encore à majorité publique. C’est-à-dire en évincer les actionnaires. Il faut en changer les critères de gestion, et conférer des pouvoirs de décision aux salariés, y compris dans les banques. Cela aurait pour première conséquence de supprimer le versement des dividendes par ces entreprises, et allègerait d’autant leurs coûts !
  • Il faut recréer des stocks stratégiques nationaux et par grande région du monde pour les matières premières essentielles pour lutter contre la spéculation.
  • Il faut augmenter l’ensemble des salaires et le pouvoir d’achat, mais de façon efficace et durable, en augmentant le salaire de ceux qui en ont un, en créant des emplois pour les chômeurs ; il faut baisser les coûts du capital ; il faut former et investir pour résorber les goulots d’étranglement, créer durablement une production accrue (avec laquelle est distribuée le revenu donc les salaires) donc en formant et en produisant autrement. Pour cela il faut réunir une conférence pas seulement « salariale », mais portant aussi sur l’emploi, la formation et la transformation productive, à partir des territoires et au niveau national, réunissant les acteurs sociaux et économiques (travailleurs, patronat, banques), les associations, les citoyens et les responsables politiques.
  • Il faut revenir sur la contre-réforme du « marché de l’énergie ».
  • Dans la transition énergétique, il faut favoriser les énergies émettant le moins de CO2 et peu coûteuses, comme l’hydroélectricité ou le nucléaire. Pour cela, il faut engager les formations de salariés pour renouveler et étendre notre parc de production d’énergie et il faut que les banques appuient les investissements par des taux zéro, d’autant plus bas que moins de CO2 est émis, plus élevé, voire dissuasif pour les modes de production émettant le plus de CO2.
  • Il faut entamer une négociation sur les charges financières de ces entreprises. En effet, celles-ci sont plombées par leurs charges financières dues à toutes leurs fusions et acquisitions passées. La baisse de leurs charges financières bancaires pourrait être accordée, si elles acceptent de baisser leurs prix et d’engager une politique d’embauche et de production durable.