Vers les assises de l’aéronautique, du spatial et du transport aérien

De la mise à l’arrêt du secteur sous le choc du confinement en 2020 à la présence à Toulouse d’Emmanuel Macron le 16 février dernier pour la « réunion informelle » des ministres européens chargés du spatial, en passant par les controverses sur la contribution du transport aérien au réchauffement climatique, tout ce qui concerne l’aviation, l’espace et la construction aéronautique ne cesse d’animer le débat public.

L’importance politique et symbolique du secteur le justifie, non moins que son importance économique et sociale.

Le transport aérien, la conquête de l’espace et la construction aéronautique occupent 435 000 personnes en France : 350 000 dans la construction spatiale et aéronautique, 85 000 dans le transport aérien. Le secteur apporte une contribution majeure à la balance commerciale du pays. Il compte quelques-unes des multinationales les plus puissantes parmi celles qui structurent notre économie.

Il est au carrefour des grandes révolutions qui sont en train de bouleverser la civilisation. Ainsi de la mondialisation, non seulement parce que l’avion en est l’une des conditions matérielles mais aussi parce que le secteur met en présence des acteurs de taille mondiale. Ainsi également de la révolution informationnelle, particulièrement présente au cœur de productions qui se situent à la pointe de la technique. Un cas particulièrement significatif est la mise en place de « constellations spatiales », formées de centaines de satellites, qui seront l’infrastructure des réseaux de communication des prochaines décennies. Leur conception et leur réalisation sont jusqu’à présent dominées par les ambitions de quelques groupes privés massivement soutenus par toute la puissance impérialiste du capitalisme monopoliste d’État nord-américain. Ainsi encore de la révolution écologique, au nom de laquelle l’avenir du secteur, l’emploi de ses travailleuses et de ses travailleurs et leur capacité d’initiative et de création font l’objet de vives mises en cause.

Interpellé sur ce terrain, le secteur peut faire valoir que les progrès techniques ont permis de passer en 40 ans de 642 millions de passagers annuels à 4,3 milliards, alors que dans le même temps le transport aérien restait à 2 % des émissions de gaz à effet de serre. Reste posée la question, face à l’urgence climatique et après le choc de la pandémie, d’une transformation profonde de la production, des technologies, de l’organisation du système des transports aériens et des activités spatiales.

En revanche, bien avant l’épidémie, le secteur voyait ses fragilités exacerbées par sa soumission à la rentabilité financière des grands groupes du transport aérien et de la construction aéronautique, par la course aux profits dans une mondialisation dominée par la concurrence entre firmes multinationales et par les marchés financiers, par sa dépendance au dollar, par des règles internationales qui font obstacle au partage des informations, des recherches, des recettes et des coûts qu’exigerait l’efficacité économique et écologique à l’heure de la révolution informationnelle, par les gâchis de capacités humaines qu’entraîne l’obsession de faire baisser le coût du travail.

La mobilisation d’une masse  importante d’argent public, permise , « quoi qu’il en coûte », par la création monétaire de la Banque centrale européenne, a limité, en Europe, les dégâts de la pandémie sur l’emploi et sur les compétences ; mais tout cela a eu pour but constant de préserver la rentabilité des capitaux privés. Les directions des groupes ont profité de la pandémie pour accélérer les restructurations et les suppressions d’emplois visant à réduire le coût du travail, et la situation des personnels de l’ensemble du secteur s’en est trouvée fragilisée et dégradée.

C’est de cette domination du capital que la filière aérienne doit s’émanciper pour que son développement apporte sa pleine contribution à ces biens communs de l’humanité que sont le climat, la biodiversité, la qualité du cadre de vie, mais aussi la liberté de circuler sur l’ensemble du globe, dans un aménagement du territoire reposant sur une coopération rationnelle entre les différents modes de transport.

Il y a donc urgence à verser au débat public des propositions originales, portées par les luttes des salariés du secteur et des habitants des territoires concernés, et s’inscrivant dans une cohérence globale : quels objectifs fixer aux activités aériennes et spatiales pour rendre la planète vivable et améliorer le bien-être de ses habitants ? Quel statut des salariés du secteur pour sécuriser leur emploi et leur formation ? Quels moyens financiers mobiliser, non plus pour venir au secours de la rentabilité du capital mais pour amorcer un nouveau type de croissance de la productivité fondé sur le développement des capacités humaines ? Quels pouvoirs nouveaux des salariés et des citoyens, quels lieux de pouvoir investir, dans nos entreprises, dans les instances politiques nationales, en Europe et dans les institutions internationales, pour imposer ces réorientations ?

Telles sont quelques-unes des questions que les militants communistes du secteur souhaitent soumettre à une grande diversité d’acteurs, d’experts, de syndicalistes, à l’occasion des assises de l’aéronautique, du spatial et du transport aérien qui occuperont toute la journée du 19 mars prochain au siège du PCF.

Économie&Politique est partie prenante de cette initiative. Elle contribuera aux débats et en rendra compte dans ses prochaines éditions. Elle vous invite d’ores et déjà à y participer.