PCF Collectif Aéronautique, spatial, avionique
Les salariés et les citoyens doivent intervenir pour exiger que l’industrie aérospatiale de notre pays réponde aux questions de la maîtrise climatique et agisse pour échapper à la domination de l’espace par les sociétés américaines porteuses de domination impérialiste.
Dans les années 1960, à partir d’un concept où l’aspect militaire était dominant, l’État français s’est résolument placé pour maitriser son propre accès à l’espace, bâti en lien avec une stratégie nationale et des budgets, avec trois grands secteurs : l’étude de projets spatiaux et pilotage du centre de lancement en Guyane ; l’étude et la fabrication de lanceurs ; l’étude et la fabrication de satellites.
Le spatial est devenu une composante essentielle de la souveraineté et de la sécurité de la France.
Cela s’est traduit en grande partie par l’étude et la construction du lanceur Ariane (Ariane 5 aujourd’hui, Ariane 6 demain). Depuis 1975, l’Agence Spatiale Européenne (ESA) a pour mission de développer, coordonner la coopération entre les États européens (20 pays adhérents) pour développer les lanceurs et installations sol dont l’Europe a besoin pour être autonome dans le domaine spatial. La France et l’Allemagne sont les principaux contributeurs financiers à ce programme.
Les lancements servent à envoyer des satellites civils, scientifiques et militaires. Une majeure partie de ces satellites est commerciale. Au quotidien, tout le monde se sert du spatial : Internet, GPS, météo… permettent le transfert de volume important de données numériques. Les antennes hertziennes sont limitées en bande passante !
Les satellites servent également aux usages suivants :
- véhicules et objets connectés ;
- surveillance des océans (par exemple pour la prévention des tsunamis), de la planète (réchauffement climatique, tremblements de terre…) ;
- aide à nos agriculteurs dans l’exploitation de leurs domaines (par exemple pour des plantations précises selon l’exposition du terrain…) ;
- prévenir et combattre les feux de forêts et bien d’autres…
- au niveau de la défense du pays : c’est la surveillance d’intrusions terrestres et aériennes, le guidage des sous-marins, bateaux, avions, drones…
Ces dernières années, il s’agit entre autres de notre capacité à mettre en œuvre une dynamique pour préparer le passage au numérique du Big Data (voiture autonome, gestion de flux logistiques, données de santé, Internet mobile dans les zones blanches, etc…) par transmission satellitaire.
La France et l’Europe se doivent d’être présentes, si elles ne veulent pas devenir dépendantes, dans un domaine vital pour la liberté et la sécurité, de forces étrangères (États-Unis, Amazon, Google …). Si l’on ne maîtrise pas notre accès à l’espace, on sera obligé de demander à un tiers qui aura les moyens d’espionner nos données et de les retourner contre nous.
Il est plus que nécessaire de maîtriser nos propres lanceurs et satellites. Il en va de notre souveraineté !
La dualité civile Ariane5/Défense nationale – missile stratégique « M », qui existe depuis plus d’un demi-siècle, doit se poursuivre.
Elle renforce le rang occupé par la France qui est le seul pays européen ayant les capacités d’études et de fabrication d’un lanceur en intégralité. Le missile stratégique nucléaire M51 fait partie des activités des groupes Safran et Airbus.
Les lanceurs en Europe :
Ariane 5 peut emporter des satellites jusqu’à 13 tonnes, alors que Vega ne peut emporter que 3 tonnes et Soyouz (Russe) 2,5 tonnes.
Malheureusement, une structure où le secteur public pilote des programmes européens d’accès à l’espace était devenue insupportable aux industriels. En 2014, le lobbying industriel, Airbus Group, Safran, (maître d’œuvre du lanceur Ariane et du missile stratégique « M ») ont convaincu les États d’opérer un changement profond de gouvernance.
En se pliant à leurs volontés, les gouvernements ont organisé l’abandon de la souveraineté de l’Europe sur son accès à l’espace. Les industriels veulent évidemment, pour engranger les profits, conserver les aides (par exemple un budget prévisionnel de 8 milliards d’euros sur 10 ans pour le programme Ariane 6 et le soutien à l’exploitation d’Ariane 5), mais sans contrainte, surtout celles de supporter les risques, ni contrôle de l’argent public qui sert, en partie, à la rémunération des actionnaires.
En 2014, les activités spatiales civiles et militaires d’Airbus et Safran étaient regroupées au sein d’une même entreprise ArianeGroup détenue à 50/50 par Airbus et Safran.
En 2014, les nouveaux actionnaires d’Ariane proposaient de faire un lanceur deux fois moins cher et dans un temps record (6 ans) ! Un lanceur Ariane 6 « low cost » pour concurrencer SpaceX. Une version à 50 millions de dollars (emport de charges = 3tonnes) et une autre à 90 millions (emport de charges =13 tonnes). Nous en sommes très loin ! La fin du programme Ariane 5 est intervenue en fin d’année 2023. Ariane 6, qui devait faire son premier vol en 2020, rencontre plusieurs problématiques techniques. Le premier vol pourrait n’avoir lieu qu’en 2024, soit quatre ans de retard par rapport aux promesses des industriels…
L’accord Europe-Russie qui permettait de faire quelques lancements sur le lanceur Soyouz est tombé du fait de la décision de boycott suite à la guerre de la Russie contre l’Ukraine.
Le programme de lancements de petits et moyens satellites (= 3 tonnes de charges embarquées) sur le lanceur Vega est lui aussi tombé à l’eau avec la guerre en Ukraine : ce pays fabriquait des ensembles de la fusée Véga.
Depuis quelques semaines, la France et l’Union Européenne ne sont plus en capacité d’aller dans l’espace !
À cela s’ajoute que l’Allemagne est devenue le premier financeur de la fusée Ariane et demande le transfert de productions sur son sol. Le gouvernement Macron a laissé faire. Une première partie devrait être transférée de l’usine ArianeGroup de Vernon vers l’Allemagne, et d’autres sont à l’étude.
L’Allemagne, l’un des partenaires du projet Ariane6 piloté par l’Agence spatiale européenne (ESA), aux côtés de la France, maître d’œuvre du programme, et de l’Italie, veut désormais faire cavalier seul en matière spatiale.
Elle entend mettre fin à cette coopération européenne dans ce domaine, en menant son propre développement de mini-lanceurs, qui feraient concurrence à Ariane et à Vega.
Cela porte l’objectif de faire des profits importants avec le lancement de constellations de satellites L’accord, survenu le 6 novembre 2023 entre les 22 membres de l’ESA (Agence spatiale européenne), entérinerait, entre autres, le principe qu’à partir de 2030 une concurrence serait ouverte sur les futurs lanceurs… C’est donc un nouveau coup de poignard dans le dos à ceux qui ont défendu depuis plus de 40 ans la coopération européenne.
De plus, c’est un encouragement à envoyer dans l’espace encore plus d’objets, alors que tous les scientifiques tirent la sonnette d’alarme sur la pollution de l’espace et celle sur terre ! Pour obtenir l’ouverture à un modèle de concurrence, l’Allemagne fait pression en menaçant de ne plus continuer à financer le lanceur européen, qu’elle juge trop cher, arguant qu’il y aurait déjà cette catégorie de lanceurs dans le monde, comme ceux de l’américain SpaceX. D’ailleurs, pour l’année 2024, l’Europe en panne de lanceurs, a décidé de confier le lancement de plusieurs satellites à l’américain SpaceX et, de ce fait, de donner notre dépendance et souveraineté aux USA qui sont fortement plébiscités par l’Allemagne.
A ce rythme, la France risque d’être dépouillée de son industrie spatiale civile et de ne rester qu’avec celle de Défense pour construire le missile stratégique « M » à un prix qui s’enflammera, ne bénéficiant plus de l’effet volume de la partie civile. Ce sont des milliers d’emplois qui sont menacés : la moitié des 7 500 emplois directs d’ArianeGroup France et des 25 000 emplois induits sur l’Hexagone !
Encadré
En 2020, en France, la filière spatiale regroupe 1 704 sociétés qui emploient 33 200 salariés dédiés à l’activité spatiale.
La France représente un peu plus de la moitié du secteur spatial européen, et 35% de ses emplois.
Parmi eux, 60% travaillent dans des grandes entreprises d’envergure internationale. Il s’agit par exemple des opérateurs de systèmes de lancement comme Arianespace, ou des constructeurs de satellites comme Thales Alenia Space (TAS) ou Airbus Defence and Space (ADS)