Hélène Bidard
Hélène Bidard, membre du comité exécutif national du PCF, est candidate en quatrième position sur la liste « Gauche unie pour le monde du travail ».
Les inégalités salariales sont massives et se réduisent très lentement : à ce rythme, on atteindra l’égalité salariale en 2186. Les femmes sont les plus touchées par l’inflation mais aussi par les réductions des services publics. Les femmes font encore plus de 85 % des « tâches domestiques » elles sont les aidantes des personnes en difficultés dans les familles et ont encore la charge de la parentalité. Les politiques d’austérité détruisent les services publics, augmentent les prix et dégradent les conditions de vie. Des pans entiers du secteur public sont offerts aux appétits du marché, partout en Europe, c’est la même logique qui atteint avant tout la vie des femmes.
Malgré des années de luttes, et 12 lois en France, les inégalités salariales et professionnelles restent massives. En 2024, les femmes gagnent 25 % de moins. Alors qu’il est obligatoire d’avoir un accord d’entreprise ou un plan d’action en matière d’égalité professionnelle, 59 % des entreprises n’en ont pas. Seules 0,2 % des entreprises ont été sanctionnées.
Les femmes sont touchées davantage par la précarité. Les pensions de retraite des femmes sont inférieures de 40 % à celles des hommes. La part des femmes travaillant à temps partiel subi, est trois fois plus élevée que celle des hommes. Les femmes subissent des inégalités de carrière et de revenus – avec un impact supplémentaire de la maternité sur le déroulement de leur carrière. Les femmes représentent 62 % des personnes payées au SMIC et 70 % des bénéficiaires des banques alimentaires. Les inégalités salariales, les bas salaires et l’inflation dégradent les conditions de vie.
Nous avons un rôle essentiel à jouer pour donner un débouché politique à la colère et aux mouvements sociaux, particulièrement pour les femmes, salariées ou privées d’emploi. Des agricultrices mobilisées en France pour une réforme des politiques européennes telle que la PAC, aux luttes pour les salaires des professeures, le pouvoir d’achat, les retraites et les revendications féministes à l’échelle européenne, ces mouvements sont essentiels pour changer les politiques européennes. D’ailleurs, chacun peut mesurer que la voix de la France compte quand elle s’engage, comme cela a été le cas sur la constitutionnalisation de l’IVG qui est un message envoyé au monde entier.
Salaires et services publics
Mettons la question de l’augmentation des salaires au cœur des enjeux européens car le problème des bas salaires est au centre des difficultés. On l’a vu dans les luttes dans le privé dans des secteurs comme le commerce notamment ces dernières années et on l’a vu récemment dans la mobilisation de la fonction publique avec des agentes qui souffrent depuis très longtemps du gel du point d’indice.
Les services publics sont, en Europe, un levier essentiel pour répondre aux besoins du monde du travail, comme aux besoins de développement de l’Union Européenne. C’est la raison de notre proposition, avec le Parti de la gauche européenne, d’un observatoire des services publics en Europe, au sein des instances de la Commission européenne, pour mesurer et évaluer les améliorations ou les détériorations de ces services et ainsi réorienter les politiques européennes. Nous proposons un fonds démocratique, européen, pour les services publics, alimenté à taux 0 % par la création monétaire de la BCE, pour renforcer les services publics nationaux qui sont la clé pour construire une société de progrès féministe.
Symptôme de la « charge mentale », la grande majorité des femmes ont tendance à repousser, pour elles, le moment de consulter des professionnels de santé. Dans le même temps, la précarité qui impacte très majoritairement les femmes se révèle être la première cause à la fois du renoncement au soin et d’un état de santé dégradé. Le cancer du sein touche une femme sur 8 avec un taux de dépistage qui a chuté de près de 10 % en 10 ans. C’est pourquoi en France et en Europe, nous portons la garantie d’un accès universel et gratuit aux soins, le renforcement des systèmes de santé publics permettant la réduction des inégalités.
Loin d’un « réarmement démographique » souhaité par Emmanuel Macron, cedont les femmes ont besoin se sont des services publics de qualité, petite enfance et perte d’autonomie notamment car ce sont les femmes qui sont en majorité aidantes. Pour la santé des femmes et les droits reproductifs, nous demandons le soutien à la création dans les États membres de centres médicaux de recherche publique dédiés à la santé des femmes ; le développement de partenariats européens et le déblocage de financement public pour accélérer la recherche sur l’endométriose ; l’accès libre et gratuit à la contraception, sous toutes ses formes, doit être garanti. Les États membres doivent garantir la possibilité d’avorter de manière sûre dans un délai rapide sur l’ensemble de leur territoire.
La mobilisation européenne en 2013 autour du droit à l’avortement en Espagne, alors menacé par un projet de loi du gouvernement espagnol de l’époque, et, plus récemment, celles en Pologne, ont montré l’existence d’un réseau, de liens et d’une solidarité permanente. La victoire du référendum pour le droit à l’avortement en mai 2018 en Irlande est une avancée de plus. L’inscription de l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution française est une avancée féministe majeure pour les droits des femmes. Nous nous battrons pour son inscription dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Mais nous devons nous battre aussi pour l’effectivité du droit à l’IVG et le choix des méthodes avec l’ambition de se donner les moyens d’une véritable égalité d’accès aux soins, sociale et territoriale. Nous défendons également le droit libre et gratuit à toutes formes de contraception. C’est pourquoi, avec le Parti de la gauche européenne, nous proposons la création d’un pôle public européen du médicament permettant que l’Europe retrouve une souveraineté et indépendance, notamment dans la production des pilules abortives et des produits nécessaires aux avortements.
Les femmes sont très majoritaires parmi les employés des services publics surtout dans le secteur social. Cela a permis historiquement leur entrée dans l’emploi et une sécurisation des contrats, ce qui est fondamental, mais les salaires y sont très bas. La précarité des salariées s’écrit au féminin : les assistante.s maternelles, les employé.e.s de maisons, les aides à domicile et les aides ménagères demeurent à plus de 95 % des femmes. Les aides-soignante.s sont à 91 % des femmes, 87 % des infirmières. 73 % parmi les agentes d’entretien, 76 % des caissiere.s et les vendeurs et vendeuses, 71 % des enseignantes… Main dans la main, le patriarcat et le capitalisme tireNT profit de la dévalorisation des femmes et de leur travail.
Le secteur public doit recruter massivement, être un bon employeur, payer correctement, écouter les employé.e.s sur la manière d’organiser le travail, ne pas imposer le travail à temps partiel. Les ressources et le financement doivent être suffisants pour que le travail soit émancipateur, et que les salariée.es ne subissent plus le fardeau éthique d’un travail mal fait.
Nous luttons pour que l’Union européenne conditionne systématiquement les aides publiques à des critères sociaux, pour l’égalité femmes-hommes, et des critères environnementaux élaborés avec les salarié·es et leurs représentant·es. Selon les données de la chercheuse Rachel Silvera : en France, les femmes vivent avec un quart de salaire en moins par rapport aux hommes. Majoritaires dans les métiers du soin et du lien, dévalorisés économiquement alors que ces métiers sont pourtant reconnus comme essentiels pour la vie des populations, depuis la crise de la COVID19.
Dix propositions concrètes
Les organisations patronales et le gouvernement refusent d’indexer les salaires sur l’inflation et organisent l’expansion dangereuse de la précarité qui touche, particulièrement la situation de familles monoparentales. Seulement 66 % des femmes en Europe occupent un emploi. Pourtant plus diplômées, elles sont présentes dans un tiers des postes d’encadrement en Europe. C’est pourquoi nous nous engageons avec 10 propositions concrètes pour l’égalité salariale et professionnelle.
1 – Nous portons l’exigence de la clause de l’Européenne la plus favorisée, contre toutes les violences faites aux femmes, pour l’égalité professionnelle et salariale, pour le droit à l’IVG dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
2 – Nous voulons le développement des services publics, condition nécessaire d’une politique féministe. Petite enfance, éducation, aide aux personnes âgées. Libérons le temps des femmes, avec un investissement massif pour des services publics de qualité et dans la formation. Dans le même temps garantissons aux agentes de meilleures rémunérations, une reconnaissance de leurs compétences et une revalorisation des métiers. Á travail de valeur égal, salaire égal.
3- Nous exigeons que les financements et les taux d’intérêts de la Banque Centrale Européenne ainsi que l’ensemble des aides publiques européennes soient conditionnés à l’égalité femmes-hommes et à un rattrapage en cas de manquements constatés.
4 – Nous exigeons l’abrogation des lois régressives contre les retraites et la mise en chantier de réformes progressistes, à partir des luttes et propositions des travailleurs.ses.
5- Nous militons pour la revalorisation des métiers dits féminisés, pour des mesures correctives contre les inégalités de pensions. Nous voulons porter le droit à un travail émancipateur, à temps complet et bien rémunéré pour toutes.
6 – Nous voulons une politique de mixité des métiers avec la revalorisation de tous les métiers et secteurs féminisés, sous l’égide d’un observatoire européen d’évaluation de l’égalité.
7-Nous sommes solidaires avec toutes les femmes, c’est pourquoi nous exigeons l’abrogation de la loi immigration, la régularisation des travailleuses, un accueil digne en Europe pour les migrantes. Nous refusons que l’absence de droits des femmes étrangères serve à rabaisser les droits de l’ensemble des femmes dans le monde du travail. Nous appelons à reconnaître le rôle essentiel et la contribution des travailleuses migrantes dans le secteur des soins et du lien. Le travail décent doit faire partie intégrante des priorités pour construire des systèmes de soins de qualité. D’où la nécessité d’un grand plan de formation, de développement des salaires et de l’emploi, une amélioration résolue de leurs conditions de travail dans ces secteurs.
8 – Au niveau de l’Union Européenne, nous appelons les institutions européennes à utiliser la compétence partagée de l’UE en matière de droits du travail pour légiférer sur l’établissement d’exigences minimales pour les conditions de travail et d’emploi visant à protéger les femmes employées.
9 – Pour ne pas laisser de côté les femmes les plus précarisées, nous appelons la Commission européenne à prendre des mesures en vue de la ratification et de la mise en œuvre par l’Union Européenne de la Convention 189 de l’OIT sur le travail décent pour les travailleurs domestiques.
10 – Pour permettre à toutes les femmes de disposer de leur temps pour pouvoir participer pleinement à la vie publique, nous appelons l’Union Européenne à utiliser le fonds FSE+ pour réduire les coûts des services de garde d’enfants dans l’ensemble de l’UE et accroitre l’offre de ces services, conformément à la garantie européenne pour l’enfant, afin que toutes les femmes puissent en bénéficier.
Ces changements ne peuvent venir que de la mobilisation de l’immense majorité des européen.nes. Nous poursuivrons cet engagement pour une transformation profonde pour une union européenne de coopération des peuples, souverains, libres et associés, pour la paix, l’égalité et la justice sociale, pour les droits de toutes les femmes. Nous portons un féminisme à la fois ancré dans la lutte des classes et dans l’universalisme que nous défendons.
Reprenons la main pour une Europe Féministe.