Une nécessaire révolution écologique et sociale pour un développement humain harmonieux

Marx rappelait que si l’homme transforme la nature pour répondre à ses besoins, cette transformation le transforme à son tour. La prise en compte de cette dialectique entre l’homme et la nature est une clé de l’action révolutionnaire. Dans le prolongement du travail engagé par ses instances depuis plusieurs décennies, le PCF a décidé lors de son 38econgrès de faire de la question écologique une question centrale de son analyse et de ses propositions.

L’écologie s’est imposée dans le débat politique

Dans la culture politique récente, mais désormais à ranger au rayon des souvenirs, les écologistes étaient perçus par les autres partis, à tort ou à raison, comme les seuls détenteurs d’un programme de défense de l’environnement, et ils en étaient les « spécialistes » dans le débat public. On leur laissait volontiers cette chasse gardée considérée comme d’importance marginale. Mais maintenant, l’écologie s’impose comme une préoccupation majeure des électeurs et chaque parti essaye dorénavant de s’approprier une part de la ressource électorale qu’elle représente.

2017 marque, de mon point de vue, une rupture fracassante puisque d’autres candidats (que ceux d’EELV) à la présidentielle portaient un programme fort sur les questions d’écologie. Je pense à Benoît Hamon et à Jean-Luc Mélenchon. Du coup, certaines de ces thématiques se sont imposées dans la campagne et, de fait, les principaux candidats, les principaux partis se sont positionnés sur les enjeux écologiques. L’élection européenne a confirmé la tendance et, lors de cette séquence électorale, et encore depuis lors, chaque parti politique muscle son programme écologique de propositions.

Désormais, la réponse aux enjeux écologiques se structure sur un axe gauche-droite avec des réponses bien différentes dans leur philosophie, un débat idéologique s’aiguise sur ce sujet. Au risque d’être un peu schématique, du côté gauche, une remise en cause plus ou moins profonde de notre société, de ses modes de production et de consommation. Du côté droit, pas de vraie remise en cause du système, des origines du problème, mais des actions réparatrices de certains inconvénients, ce qu’on appelle le capitalisme vert.

Si on ajoute à ce tableau le fait que tous les sondages montrent que les questions environnementales sont une des préoccupations prioritaires des Français, et particulièrement dans l’électorat de gauche, alors, oui, je le pense, l’écologie est en train de devenir progressivement un des enjeux politiques fort et structurant des années à venir, et se renforcer comme partie intégrante du programme de la gauche moderne de demain car elle met en cause, au fond le système capitaliste comme principal responsable des dommages environnementaux.

D’où vient cette exploitation non régulée, non durable des ressources naturelles ?

En effet, les modes de production sont plus dictés par le souci de maximisation d’un taux de profit que par celui du respect des ressources naturelles. La surexploitation de l’Homme est une réalité, celles des ressources naturelles aussi ! Le ver est dans le fruit. Et la préoccupation des capacités de résilience des écosystèmes (capacité à se régénérer) est balayée par l’appât du gain. Le mode productiviste capitaliste est, de fait, responsable de beaucoup de dégradations en exploitant sans fin les ressources… À cela se rajoute l’obsolescence programmée pour inciter à consommer de nouveau, et épuiser plus encore les ressources, incitation à une consommation débridée.

D’ailleurs, on parle dorénavant de dette écologique (le fameux jour du dépassement). Et cette dette se creuse chaque année un peu plus. Ce concept de dette est lié au fait que nous exploitons les ressources naturelles en quantité supérieure à leur vitesse de renouvellement. Ce système n’est pas durable. Il mène droit à une crise écologique majeure !

C’est ce que chacun peut constater notamment avec le réchauffement climatique. L’origine du mal est connue : les émissions de CO2dues pour beaucoup à l’utilisation du pétrole et ses dérivés, du charbon, du gaz… Les solutions alternatives existent et/ou sont en voie de développement. L’urgence commande de les appliquer rapidement. Et pourtant, l’égoïsme du profit, la puissance des lobbysfont que les mesures ne sont pas prises par les gouvernements des différents États. À l’instar de la France qui fait figure de mauvais élève avec, sur la période 2015-2018, un dépassement de 7 % des émissions carbone par rapport aux engagements pris à la COP 21. Et, faute d’une politique volontariste, legouvernement s’attend déjà à dépasser de 6 % ses niveaux d’émission carbone pour 2019-2023 !! 

Comme l’opinion publique se préoccupe toujours plus d’environnement, il faut bien répondre aux attentes. La réponse écologique « de droite » consiste à proposer des réponses de « marché », des activités profitables : le « capitalisme vert ». Tout est bon pour faire de l’argent : recyclage de déchets, épuration de l’eau, dépollution des sols… Cela répond indéniablement aux attentes, à tout le moins partiellement. Mais on continue à produire du déchet sans réduire le niveau d’emballage des produits, on continue à polluer les eaux sans s’engager de manière volontariste vers l’agriculture bio, on ne contraint pas réellement les entreprises à dépolluer lors d’une cessation d’activités… ! Bref, on gagne de l’argent aux 2 bouts de la chaîne sans mettre vraiment fin aux mécanismes intrinsèques de la crise écologique.

L’écologie anticapitaliste et progressiste

Face à ce constat, le besoin d’une rupture forte se fait sentir avec le modèle de production capitaliste qui a prévalu jusqu’à présent. Il y a besoin d’un nouveau mode de développement qui soit respectueux de la planète et à même de nous sortir de la crise écologique. Ce modèle est à inventer. À nous de l’inventer ! La prochaine révolution se doit d’être écologique et sociale !

L’alternative au capitalisme, économiquement parlant, se trouve dans les théories de Marx. Alors, on pourra nous rétorquer que le communisme n’a pas fait ses preuves sur les questions écologiques. C’est à la fois vrai et faux. Vrai dans le sens où le modèle soviétique s’est imposé comme un mode de production polluant pour rattraper les pays capitalistes. Faux dans le sens où, par exemple, la Chine est un des pays qui fait les efforts les plus importants pour lutter contre le réchauffement climatique. Parmi les pays qui se revendiquent de la gauche de transformation sociale, je pense à l’Amérique latine, certains pays essayent de mettre en place des expériences de protection des biens communs (les ressources naturelles) tout en assurant leur développement. Alors, sans copier de modèle, il faut revisiter ce qui a été mal fait, inventer de nouvelles solutions.

Marx & Engels disaient qu’« on ne commande bien à la Nature qu’en obéissant à ses lois ». Revenir aux fondamentaux marxistes, c’est avoir le souci du développement durable ! Parce que les écosystèmes, la biodiversité, cela fait partie du patrimoine de l’humanité, des biens communs. C’est un repère idéologique fort qui s’oppose à la propriété privée des ressources naturelles et leur surexploitation.

Le progrès social, dimension incontournable de l’écologie

À un système capitaliste pollueur, il faut opposer un modèle sociétal nouveau, fait de développement humain durable. Trop longtemps l’écologie, dans le champ politique, a opposé les revendications sociales aux revendications écologiques. Elles sont pourtant incontournablement complémentaires. En effet, comment la nature peut être respectée quand l’humain ne l’est pas ?

Les exemples foisonnent. Dans le tiers-monde, la survie individuelle passe largement avant les préoccupations environnementales. Et la vision acérée des problématiques environnementales par les pays riches se brise sur les océans de pauvreté des pays du Sud.

Plus proche de chez nous, quand, en Grèce, les populations sont maltraitées par la cure d’austérité et ne peuvent plus payer leurs factures d’électricité considérablement augmentées, les Grecs se chauffent au bois, entraînant une déforestation préoccupante.

On le comprend aisément, la transformation sociale, la satisfaction des besoins humains est la condition indispensable à la prise en compte des problématiques environnementales par le plus grand nombre.

Je prends un exemple très « terre à terre ». Le développement de l’agriculture bio, c’est nécessaire, pour des raisons de santé humaine, pour des raisons de respect de l’environnement. Mais ce discours n’est reçu que si l’on a les moyens de se payer les aliments bio. En France, un certain nombre de classes sociales ne peuvent s’approprier cet enjeu. L’augmentation du SMIC et du pouvoir d’achat participent de cet objectif écologique de développement du bio. Voilà un bel exemple de la nécessaire prise en compte des problématiques sociales pour faire progresser les causes écologiques.

Le PCF doit mettre l’écologie en tête de gondole de ses propositions phares

Oui, je le crois, l’écologie est rouge. C’est un des nouveaux terrains de jeu de la lutte des classes, car ce sont les riches qui polluent le plus et les pauvres qui ont le plus de mal à s’adapter aux changements environnementaux. C’est un des nouveaux enjeux d’actions révolutionnaires pour changer notre société, productiviste et non durable, mais aussi notre vie, notre bien-être. Il y a besoin de solutions de rupture avec le capitalisme, le libéralisme, qui par essence, sans mauvais jeu de mots, sont à l’origine des pollutions, des dysfonctionnements de notre planète. Oui, il y a besoin de rupture, de changement de système, de changement de société. La prochaine révolution sera écologique et sociale !…. Ou ne sera pas.

Le grand mérite des écologistes de tout poil, partisans d’EELV, associatifs… est d’avoir alerté l’opinion publique sur les risques pour la planète, les mauvaises pratiques environnementales… Mais les réponses apportées par les écologistes ne touchent pas assez souvent à l’origine des problèmes, au système et, pour appeler un chat, un chat, au système capitaliste, sur-exploiteur de l’Homme… mais aussi des ressources naturelles ! S’adresser au citoyen pour des gestes écoresponsables, à dimension individuelle, c’est bien. Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi des réponses collectives : un changement profond et radical de mode de production, un changement de système, aller vers le durable et non l’égoïsme du profit ! Une révolution écologique pour changer fondamentalement la société afin que les biens communs – parmi lesquels figurent au premier plan les ressources naturelles – soient la propriété de tous et non privatisés au profit de quelques-uns.

Nous n’avons donc pas à avoir de complexes vis-à-vis d’EELV qui n’apporte pas des réponses sur ce point. Il ne remet pas en cause le capitalisme et certains de ses dirigeants sont prêts à des alliances de circonstances y compris avec la droite pour mettre en œuvre des politiques écologiques libéro-compatibles.

Et pourtant même un Nicolas Hulot affirme « Nous avons une révolution à faire… Inventer un nouveau modèle économique, à la fois écologique et solidaire. Notre démocratie est fatiguée, notre modèle économique épuisé ». Cela devrait nous conforter sur ce qui fait la force et l’originalité de notre parti : l’anticapitalisme et des propositions révolutionnaires. Il faut marteler qu’il n’y aura pas de sauvegarde de la planète sans sortie du capitalisme, sans changements profonds du système de production !

Cela interroge notre activité pour ne pas passer à côté de ce mouvement d’idées et faire percevoir aux camarades que ces questions peuvent être un puissant vecteur pour faire progresser nos idées et notre influence. Gagner une crédibilité sur nos propositions écologiques ne se fera pas en un coup. Cela nous oblige sur la durée, pour convaincre de nos convictions en la matière, faute de quoi nous laissons le terrain libre à d’autres partis alors que nos propositions sont fortes, à même de répondre aux problèmes.

Des propositions phares pour le climat !

La préoccupation pour le climat se fait plus forte jour après jour. C’est la mère des batailles écologiques. Je pourrai développer des propositions sur d’autres aspects, je me limiterai pour cet article à celle qui concerne le climat. En effet, les manifestations « climat », avec une jeunesse particulièrement mobilisée, demandent d’agir. Vite. Et mettent en cause le système (capitaliste) avec des slogans tels que : « C’est le système qu’il faut changer, pas le climat. Si le climat était une banque, on l’aurait sauvé. Pour de l’argent, ils tueraient terre et mer. Sauvons la banquise, pas les banquiers. Non aux légumes qui voyagent plus que moi »…

Comme souvent, cette mobilisation est empreinte de contradictions, avec pour beaucoup de personnes une réflexion qui s’arrête à la défense « basique » de l’environnement et à des logiques de réponses par des gestes individuels qui ne règlent en rien la question, mais, et cela nous met particulièrement à l’aise, pour une part croissante et non négligeable, de plus en plus « politisent » la question par des réflexions anti-système capitaliste.

Il faut aider une proportion plus importante de cette jeunesse mobilisée à pousser la réflexion et l’action à une prise de conscience anticapitaliste. Une partie de la lutte idéologique se joue là ! À ceux-là, il faudra dire : « Il faudra choisir : soit le marché et la loi du profit, principaux moteurs de la dégradation climatique, soit des règles politiques fortes, financées par ceux qui possèdent les richesses (et polluent), pour gagner la bataille pour la protection de la Planète ! »

Et, sans attendre le grand soir de la révolution écologique et sociale, on peut agir immédiatement pour le climat. En prenant des mesures d’urgence. Nous proposons de réduire les émissions de carbone produites par les transports (le principal émetteur de carbone en France avec 29 % des émissions) :

  • En passant à la gratuité des transports en commun.
  • En développant le transport ferroviaire fret et passager pour s’attaquer au transport « tout camion ». Il faut que l’Europe décide d’un plan de grands travaux.
  • En taxant le kérosène.
  • En privilégiant les circuits courts agricoles comme industriels.

Nous proposons également la rénovation thermique de 1 million de logements pour agir là encore très concrètement sur la réduction des gaz à effet de serre.

Toutes ces mesures sont de l’ordre de l’écologie positive : elles redonnent un peu de pouvoir d’achat aux familles, elles créent des emplois.

Et pour financer tout cela, nous proposons que la BCE réoriente l’argent : plutôt que de financer les marchés financiers, elle peut financer par des prêts à 0 % un fonds européen de développement social et écologique, de développement des services publics.

Portons ces propositions dans le débat public et dans l’action. Elles sont bien accueillies. Elles marient les actions concrètes de proximité à but de changement immédiat et une visée révolutionnaire de plus long terme. Du communisme vert. À même de nous permettre de marquer des points !

Activités du PCF

Enfin, le parti doit former ses militants pour cela. Il doit rendre plus lisible sa parution « Planète Humanité » qui traite des enjeux écologiques. Il doit leur permettre de s’approprier idées et actions. C’était le sens des premières « Assises communistes de l’écologie ». Elles seront prolongées par une journée d’étude afin de poursuivre le travail programmatique sur des thématiques à dimension municipale (transports en commun, pollution de l’air, logements, eau et assainissement, déchets…) et une deuxième édition des Assises communistes de l’écologie est envisagée pour poursuivre notre travail dans ce domaine.