La cohérence d’ensemble de nos propositions économiques pour l’Europe

Frédéric BOCCARA
économiste, membre du comité exécutif national du PCF

Intervention liminaire de Frédéric Boccara, membre du bureau exécutif du Parti de la Gauche européenne, candidat sur la liste « Gauche unie pour le monde du travail », au débat d’experts économiques  « Visions for Europe » organisé par la fondation Bruegel et le Financial Times à Bruxelles le 15 avril 2024, avec Thanasis Bakolas, secrétaire général du Parti populaire européen, Alva Finn, directrice d’ELF, fondation de l’Alliance des Libéraux et Démocrates pour l’Europe, Dirk Friedrich, coordinateur du groupe Identité et Démocratie (extrême-droite) pour l’économie, le budget et la cohésion, Rasmus Nordqvist, membre du bureau des Verts européens, Maria João Rodrigues, présidente du Réseau économique et financier du Parti des Socialistes européens, L’intégralité du débat peut être visualisé à cette adresse : https ://www.bruegel.org/event/visions-europe-economic-expert-debate-2024-eu-elections

L’Europe, celles et ceux qui y vivent, sont confrontés à de grandes difficultés. Nous avons besoin d’un changement profond.

Ce qui provoque cette souffrance de l’Europe et des citoyens, c’est la domination des marchés financiers, et l’obsession du taux de profit dans toute la vie économique et sociale.

L’un et l’autre sont relayés et renforcés par la Banque centrale européenne (BCE), exacerbés par ses récentes décisions de relever fortement ses taux d’intérêt, et par la conception actuelle de ce que doit être l’UE. Cela entraîne une stagnation et une grave pauvreté en Europe, des difficultés pour nos voisins, et même la guerre.

Nous avons besoin d’un nouveau type de croissance  : écologique et sociale – simultanément – et géographiquement équilibrée. Cela implique de mettre fin à l’austérité pour les gens, pour les services publics et pour l’écologie, et de mettre fin à l’open bar pour le capital, les profits et les dépenses militaires.

Au lieu de petites compensations ou corrections, nous avons besoin de nouveaux principes  :

  • la coopération et le partage au lieu de la concurrence et de l’appropriation privée ;
  • la démocratie (des institutions politiques jusqu’à la BCE et aux entreprises) et de nouveaux critères d’utilisation de l’argent et des financements au lieu du monopole du pouvoir et des critères du marché financier (la rentabilité par-dessus tout).

Nous mettons l’accent sur  trois séries de mesures  :

  • intégrer des critères écologiques et d’emploi dans toutes les décisions économiques, en particulier pour le financement de l’économie et le refinancement des banques par  la BCE, ainsi que pour les subventions publiques
  • créer un Fonds européen pour les services publics, financé à 0 % par la création monétaire de la BCE, finançant les dépenses des États s’ils développent les services publics et l’emploi, avec une gouvernance démocratique. Cette proposition changerait la logique actuelle de la construction de l’UE mais elle est autorisée par les traités existants.
  • agir pour changer l’ordre économique mondial, en particulier
    • mettre en œuvre des accords de commerce et d’investissement d’un nouveau type, visant la maîtrise du commerce et de l’investissement pour le développement commun des biens publics et de l’emploi ;
    • agir pour la dédollarisation, la transformation du FMI, et une émission mondiale massive de droits de tirage spéciaux (DTS) à 0 % d’intérêt pour les services publics et avec des critères d’emploi et d’écologie pour les entreprises ;
    • penser et construire l’Union européenne comme un pont entre le Nord et le Sud, et non comme un relais des États-Unis.

En d’autres termes, nous avons besoin d’un nouveau type de « quoi qu’il en coûte », avec des critères écologiques et sociaux, et de démocratie pour

  • stimuler la demande pour afin d’éviter une récession et une plus grande pauvreté ;
  • transformer l’offre (la production) pour qu’elle soit écologique, sociale et plus équilibrée à l’intérieur de l’Europe, et avec le reste du monde ;
  • ne pas rester entre les mains des marchés financiers et des actionnaires.