Plein-emploi de précarité ou sécurité d’emploi et de formation ?

Réorganiser Pôle Emploi ou agir sur les entreprises ?

Au lieu de tordre le bras aux chômeurs, il faut changer le travail et les critères de gestion des entreprises, décupler les dépenses de formation.

Avec son projet de loi « plein-emploi », Emmanuel Macron et son gouvernement atteint les abysses du cynisme. Depuis des mois, des millions de jeunes, de femmes, d’hommes, de travailleur.se.s refusent le recul de l’âge de la retraite et un travail moins éprouvant, ce qui permettrait d’embaucher tout de suite de nombreux jeunes. Il en rajoute dans la détérioration de l’emploi et du travail.

Il prétend que le problème de l’emploi est en passe réglé en brandissant un chiffre de diminution du nombre de chômeurs. Or, par rapport à fin 2019 (avant la pandémie), la diminution du nombre d’inscrits à pôle emploi en catégorie A, B et C (-371.000) représente deux fois moins que l’augmentation du nombre d’apprentis et de CEJ (contrats emploi-jeunes), deux dispositifs gratuits pour les employeurs (700.000 personnes au total, soit 400.000+300.000), sans parler des radiations.

La précarité de l’emploi a donc progressé et la diminution du chômage s’explique en grande partie par une main d’œuvre quasiment gratuite.

Quant au taux de chômage, il est en réalité au niveau qu’il avait juste avant la grande crise financière de 2008, mais avec au moins 480.000 personnes supplémentaires découragées de rechercher un emploi (le « halo du chômage »).

Voilà le plein-emploi de M. Macron et de Mme Borne : n’importe quel travail à tout prix, précaire, mal rémunéré, peu formateur ni épanouissant et loin être efficace !

Il n’est pas étonnant alors de voir « en même temps » des pénuries historiques d’emploi dans des métiers cruciaux allant de l’industrie (soudeurs, chaudronniers…) aux services publics (infirmières, enseignants). En septembre, EDF a fait venir 100 soudeurs d’Outre-Atlantique pour pouvoir remettre en service ses centrales nucléaires, et à l’Éducation nationale, comme on manque de profs de maths, le rétablissement des mathématiques dans le tronc commun du lycée se fera avec des professeurs… d’autres matières !

Au contraire, il faut former, créer des emplois de qualité, baisser les prélèvements du capital pour financer des investissements efficaces. Il faut planifier, responsabiliser les entreprises et les banques pour qu’elles donnent la priorité à l’emploi au lieu de leurs profits égoïstes et de gonfler leurs capitaux. Ceci aussi bien pour répondre aux souffrances sociales qu’à l’urgence climatique ou aux défis de modernisation et de maîtrise de la révolution informationnelle.

Mais le projet examiné aujourd’hui en conseil des ministres fait tout l’inverse. Il tord le bras des chômeurs pour qu’ils acceptent au plus vite n’importe quel emploi, au lieu de décupler leur formation et de responsabiliser les entreprises pour qu’elles créent des emplois de qualité utiles au pays. Il fait disparaître la notion d’assistance en forçant les titulaires du RSA à une « activité » de 15 à 20 heures (un mi-temps), sous menace d’un harcèlement humiliant et décourageant sur la maigre allocation qu’ils perçoivent. Il ne prévoit rien pour la formation. Il ne prévoit pas de planification des besoins d’emploi, de qualification, de transitions professionnelles, calés sur ceux du pays. Il tend même à substituer la notion de « compétence » à celle de « qualification ». Planification ? Connaît pas ! Transitions maîtrisées ? Ignoré ! Sécurité ? Pour les profits ! Pour les salariés, ce sera précarité d’emploi et de revenu !

Le gouvernement ne prévoit même pas un plan d’embauche massif dans le service public de l’emploi, alors que le rapport commandité par les ministres (emploi et économie) a montré que dans les pays cités en exemple, il y a près de 4 fois plus d’agents par rapport aux demandeurs d’emploi.

La réforme du lycée professionnel est à l’unisson : elle organise la mise à disposition rapide d’une main d’œuvre moins formée, pour les besoins étroits et immédiats du patronat, au lieu de relever le défi des métiers nécessaires pour l’écologie et développer le pays, métiers de la santé, de l’écologie, de l’industrie etc.

Mais le plein-emploi n’a jamais voulu dire l’emploi de toutes et tous. Il signifie un taux de chômage de plusieurs millions de personnes, et il ne se préoccupe pas des demandeurs d’emploi découragés, ni de la qualité des emplois ou de leur utilité, encore moins de formation ou de salaire.

Former et créer des emplois de qualité, durables et sécurisés, efficaces, c’est pourtant la priorité du pays.

C’est pourquoi le PCF propose un tout autre paradigme que le plein-emploi : une sécurité d’emploi et de formation pour chacune et chacun. Il s’agit de viser l’éradication du chômage lui-même.

Pleinement réalisé, il offrira à chacun, un bon emploi, ou une formation débouchant sur un emploi amélioré ou un autre emploi, dans une sécurité de revenu. Il permettra d’affronter positivement nos défis climatiques et sociaux.

Pour cela, il donner au service public de l’emploi et de la formation une mission de sécurisation » : appuyer les personnes dans leurs démarches, les former et sécuriser leurs revenus. Il faut aussi lui donner beaucoup plus de moyens.

Il faut responsabiliser les entreprises et les banques. Il faut baisser le coût et les prélèvements du capital sur les entreprises, au lieu de dénoncer le prétendu coût du travail ! IL faut créer des contrats sécurisés pour les salariés avec une continuité de droits sociaux.

Il faut créer dans les entreprises des instances de planification et de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, dotées de pouvoirs réels et de moyens.

Dans les territoires, il faut créer des instances de planification stratégique, incitative et démocratique, avec l’organisation d’un suivi des engagements pris. Ceci jusqu’au niveau national.

Il faut changer les règles de l’Union européenne pour que, de la BCE à la Commission, elle pénalise la spéculation et la précarisation des emplois et appuie l’emploi de qualité, la formation, l’écologie, les services publics, la protection sociale.

Nous présenterons dans les semaines qui viennent notre projet pour aller vers cette sécurité d’emploi et de formation. Les modalités de sa construction peuvent être inscrites dès aujourd’hui dans l’ordre juridique, comme l’a fait la proposition de loi déposée en avril 2017 par André Chassaigne et ses collègues communistes à l’Assemblée nationale (https ://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/propositions/pion4413.pdf)

Nous le mettons à la disposition de toute la gauche, de tou.te.s les citoyen.ne.s et travailleur.se.s du pays. C’est une boussole pour construire de nouveaux jours heureux.