Coronavirus : conjurer la crise économique

Avec la crise du coronavirus, la France, l’Europe, le monde, se trouvent en état d’urgence. L’épidémie, facteur accélérateur et catalyseur, n’est pas la cause fondamentale de la crise économique et financière très grave qui se dessine. La cause profonde, c’est la suraccumulation mondiale de capital matériel et financier : le ralentissement de la croissance était déjà engagé bien avant l’apparition du virus. L’épidémie est un révélateur des limites atteintes par le type de croissance capitaliste et du besoin absolu de s’émanciper de la dictature des marchés financiers. Il faut relever quatre défis : face aux krachs boursiers qui se succèdent, il faut soutenir à la fois le pouvoir d’achat, préserver les compétences comme l’emploi, renforcer tout de suite le système sanitaire, et renforcer l’efficacité de l’offre productive en l’orientant vers de nouveaux buts sociaux et écologiques. Sur le fond, c’est le besoin d’une maîtrise de la mondialisation qui se pose. Elle doit reposer sur de tout autres principes, de coopération et de partage dont on ne peut se passer, visant le développement des biens communs – emploi, santé, environnement – et non le profit. Bref, l’Humain et la panète d’abord contre la loi du capital.

Tout de suite, nous proposons

En France :

  • une loi de finances rectificative (collectif budgétaire) de l’ordre de 30 milliards d’euros, comportant 4 milliards de crédits nouveaux pour le système de santé public et, au-delà, des mesures de soutien à l’ensemble des services publics où les besoins d’embauches et de formation sont criants. Cela suppose de suspendre sine die les interdits du  Pacte de stabilité et du pacte budgétaire (déficits publics et dette publique respectivement inférieurs à 3 % et 60 % du PIB) ;
  • mise en place d’instances démocratiques de suivi de la mise en œuvre des dispositions ci-dessous dans les entreprises et les territoires ainsi que de suivi et contrôle du crédit, sous l’égide des conseils régionaux et des CESER, avec l’appui des services de l’État. Ces instances pourraient être saisies par les représentants des salariés ou les élus, représentants de la population ;
  • soutien du pouvoir d’achat : blocage des prix des dépenses dites « pré-engagées » (loyers, tarifs des télécommunications et des assurances…) et blocage à la hausse des prix des produits de première nécessité jusqu’à la fin de l’épidémie. Garantir l’accès effectivement gratuit au système de santé et de dépistage pour toutes et tous, y compris SDF, sans-papiers et réfugiés ;
  • dans les grands groupes, moratoire sur toutes les suppressions d’emplois pendant toute la durée de l’épidémie ;
  • mobilisation des trésoreries abondantes des grands groupes pour faciliter le crédit interentreprises en faveur des salaires et de l’activité des PME ;
  • dans les secteurs touchés par la rupture des chaînes d’activité (automobile, aéronautique…), mise en place de crédits bancaires de trésorerie à taux réduit, refinancés par la BCE,  sous conditions strictes de maintien de l’emploi et de la rémunération des salariés concernés ;
  • plan de mobilisation des grands groupes du secteur pharmaceutique pour faire face à l’urgence de l’épidémie et pour consolider durablement la filière ;
  • mise en place d’un dispositif exceptionnel de crédits de trésorerie bonifiés pour les PME-TPE : plus celles-ci prendront des engagements favorables en termes de salaires et d’emplois préservés, ou de formation, plus le taux de ces crédits sera réduit, jusqu’à être fortement négatif. Ces crédits devront être intégralement refinancés à 0%, voire moins, par la BCE ;
  • en même temps que des avances longues à taux zéro voire négatif pour les maintiens de salaires et emploi, le dispositif de mutualisation pour chômage partiel doit être élargi : maintien du salaire à 100%, incluant les salaires au-delà du SMIC, avec un abondement supplémentaire de l’Etat, des trésoreries des grandes groupes et d’un Fonds européen (financé par la BCE) ;
  • il ne faut surtout pas recommencer les errements des krachs précédents. La fourniture en urgence de liquidités par la BCE au système bancaire doit être assortie de critères précis : pas de refinancement des crédits alimentant la spéculation et les opérations financières, accès à un refinancement à taux négatif réservé aux crédits favorables à la sécurisation de l’emploi et de la formation.
  • suivi et contrôle du crédit et de la mise en œuvre de ces dispositions sous l’égide des conseils régionaux et des CESER ;
  • retrait immédiat du projet de réforme des retraites qui fragilisera l’ensemble de l’économie.

Au niveau européen :

  • abandon définitif du « Pacte de stabilité » budgétaire. Ouverture d’une négociation pour un nouveau traité remplaçant le TSCG (traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance) et pour la définition d’un nouveau statut et d’un nouveau mandat de la BCE ;
  • mise en place d’un Fonds de développement économique, social et écologique européen financé par la BCE. Cette nouvelle institution financerait des investissements démocratiquement élaborés, décidés, suivis et contrôlés dans chaque État membre de l’UE et visant à développer les services publics dans tous les services, à commencer par la santé, et à répondre à l’urgence écologique ;
  • création d’un pôle public européen du médicament (recherche et production).