Les niveaux des profits atteignent des records, en France et dans la plupart des pays capitalistes avancés. Ainsi la part des profits dans la valeur ajoutée aurait, d’après l’INSEE, enregistré son record depuis 70 ans en dépassant les 35 % ! Les dividendes distribués sont plus élevés que jamais avec un record mondial de 2 095 milliards de dollars (IHS Markit), le double de la masse distribuée après la crise financière.
Quelles en sont les raisons ? La création monétaire des banques centrales des pays dominants et les aides publiques aux entreprises… sans conditions ! Comme le patronat a le monopole des pouvoirs pour décider leur utilisation, elles sont donc allées essentiellement aux profits et au capital. En outre, l’État a annulé des cotisations sociales (creusant donc le déficit public, lui-même financé par les avances monétaires de la BCE, mais indirectement, en gonflant d’abord les trésoreries des intervenants financiers). De même, il a pris en charge les salaires par le dispositif d’activité partielle. Mais aussi, le chômage massif, le morcèlement des situations avec le télétravail et les divisions identitaires travaillées par toutes les forces réactionnaires n’aident pas à un rapport des forces de luttes en faveur des salariés. Toutefois les mobilisations pour les salaires reprennent, même si le patronat s’emploie à les morceler.
Est-ce à dire qu’il ne fallait pas aider les entreprises ? Bien sûr que non. Mais aider leurs salariés, leur formation, la R&D et l’investissement efficace pour aider au développement des capacités productives et créatrices des entreprises. Lorsque l’État a affiché de maigres conditions, elles n’avaient pour objet de durer que le temps du premier confinement. Mais les trésoreries gonflées le sont restées au-delà et alimentent donc les profits ! Pour un résultat calamiteux.
Quelles en sont les conséquences ? Les insuffisances de production, les pénuries d’emploi, le refus de véritablement engager une transition – une révolution – écologique sont criants. Quatre éléments : le déficit du commerce extérieur de marchandises est en passe de dépasser les 90 milliards, les émissions de CO2 ont repris de plus belle, le nombre de chômeurs est plus élevé que jamais, le prix des matières premières s’envole, résultat de ces insuffisances et de la spéculation. Celle-ci crée des menaces de famine dans les pays du Sud.
La spéculation redouble, alimentée par le double carburant des profits et de l’argent des banques centrales : les Bourses ont encore gagné plus de 30 % en 2021, les rachats d’entreprises atteignent un sommet historique (5 815 milliards de dollars en 2021). Ces rachats se font au détriment d’investissements matériels ou de R&D, d’embauches, de formation encore à la place d’accords de partage des technologies entre entreprises, qui seraient efficaces et non coûteux.
Plus profondément, cette hausse des profits s’accompagne d’une hausse de la valeur financière des capitaux. Cela contrecarre l’effet sur le taux de profit (rapport profit sur capital). Par exemple, les profits d’Apple se sont envolés de 55 % depuis 2019 mais la valeur du titre a crû encore plus (+160 %). Les actionnaires exigent donc une part de profit encore plus élevée pour tenir leur rendement. Ou ils spéculent de plus belle, relançant la course poursuite folle. Ils en veulent toujours plus. Ils sont même prêts à accorder des petits +2 % ou +3 % d’augmentation salariale (Laurence Boone, cheffe économiste de l’OCDE). Voire à un (petit) impôt exceptionnel et temporaire !
Que faire ? Il faut évidemment changer les critères d’utilisation de l’argent : là où il est mis et à quoi il est utilisé. Pour cela il faut des pouvoirs sur cette utilisation de l’argent. A tous les niveaux : entreprises (pouvoirs des salariés et nationalisations nouvelles), État (aides publiques, dépenses), banques (nationalisations pour un pôle public bancaire), BCE.
Bref « De l’argent pour l’hôpital, la formation, l’emploi, la recherche et l’investissement efficace, pas pour le capital ! », comme l’ont déjà exigé 108.000 signataires.
Il s’agit « juste » de diriger l’argent autrement. Une vraie révolution ? Mais le feu couve. Nous pouvons l’entamer. On ne s’en sortira pas en s’en tenant à redistribuer, à prélever par la fiscalité un petit peu de ce flot énorme.
Elle peut s’entamer avec le peuple de France et en s’adressant aux peuples du monde comme à ceux de l’Europe.
Telle est la logique du programme que nous portons avec Fabien Roussel pour la présidentielle.